Nicolas se tenait dans l'encadrement de la porte

Nicolas se tenait dans l'encadrement de la porte de la salle de bain.
"Qu'est-ce que tu fous là ?! Tu m'as fait peur, putain !... Attends, je m'habille et j'arrive."
Je claquai la porte et m'habillai en vitesse. Je ressortis pour filer à ma chambre et baisser le volume de la musique.
"Tu m'as fait peur, putain ! T'es fou ou quoi ?"
Nicolas était assis sur mon lit, le dos bien droit, et me regardait faire avec indifférence.
"Ben, j'ai sonné mais t'as pas répondu. Comme j'entendais la musique, je savais que t'étais là. J'ai appelé du bas des escaliers mais t'as pas entendu...
- Et ça faisait combien de temps que tu me reluquais comme ça ?
- Je te reluquais pas, je venais juste d'arriver quand tu m'as vu. Excuse-moi."
J'allumai une cigarette pour essayer de me calmer.
"C'est bon, c'est bon, on va pas en faire un flan... mais tu m'as fait peur, vraiment ! Qu'est-ce que tu voulais, d'abord ?
- Et toi ?
- Comment ça, "et moi" ?
- T'es venu à la maison tout à l'heure, non ?
- Euh... oui. Oui, je suis passé mais apparemment vous n'étiez pas là. Alors je suis reparti, c'est tout.
- Et qu'est-ce que tu voulais ?
- Rien. Rien. Je sais pas."
Je fumais nerveusement. J'étais absolument incapable d'expliquer à Nicolas ce qui m'avait poussé à aller chez lui ainsi.
"Tu voulais voir où on habitait, c'est ça ? Tu voulais voir la ferme des deux tarés du village ?
- Mais non, comment ça...
- Fais pas l'innocent, je sais très bien ce qu'on raconte sur nous.
- Et bien pas moi. Et je n'ai pas envie de le savoir. Je veux pas connaître la vie des gens, je veux pas savoir ce qu'on dit sur vous ou sur les autres. Ça ne m'intéresse pas."

Nicolas ne bougeait pas. Il transpirait légèrement, moi j'étais déjà en nage. La lumière qui filtrait à travers le volet striait la chambre de fins traits de poussière tourbillonnante.

"Y'a pourtant des choses à savoir, tu crois pas ?"
Je levai les yeux vers lui.
"Comment ça ? Je te dis que ça ne m'intéresse pas. Allez, laisse-moi s'il te plaît, j'aimerais bien être seul et me reposer un peu, là. Laisse-moi s'il te plaît, Nicolas."